La société civile palestinienne face au « plan de paix » de Trump

10 février 2025

Les organisations et collectifs palestiniens signataires soulignent l’urgence absolue d’un cessez-le-feu permanent et de la fin du génocide en cours. Cependant, nous ne pouvons pas croire que le « plan en 20 points » proposé, conçu par les États-Unis et Israël, mettra réellement fin aux souffrances, garantira la protection de notre peuple et l’aide humanitaire inconditionnelle, ni ne mettra fin au blocus.

Après avoir enduré un génocide qui dure depuis deux ans, les Palestiniens sont désormais contraints de négocier la fin du massacre dont ils sont victimes et de renoncer à leur droit fondamental et inaliénable à l’autodétermination. Les Palestiniens sont les premières victimes d’un génocide dans l’histoire moderne à devoir négocier la fin des crimes internationaux perpétrés à leur encontre, tout en se voyant refuser de force leur droit fondamental à l’autodétermination. La proposition, rédigée en l’absence de tout expert palestinien, n’est, dans son principe, son contenu et son processus, qu’une simple continuation des politiques et pratiques d’apartheid colonialistes d’Israël et de son occupation illégale, même si les acteurs sont différents.

On ne peut pas faire confiance à Israël et aux États-Unis pour servir de médiateurs impartiaux en vue d’un cessez-le-feu permanent à Gaza et du respect des droits fondamentaux des Palestiniens, notamment le droit au retour et le droit à la vie. Le recours à la famine forcée, aux menaces de mort et aux ultimatums pendant ses attaques génocidaires brutales afin de faire pression pour faire accepter un accord qui viole le droit international est une tactique visant à rejeter la responsabilité des échecs sur les Palestiniens plutôt que sur l’occupant et l’auteur de crimes internationaux. Loin d’être une source de stabilité dans la région, les États-Unis ont activement provoqué des divisions, alimenté la violence et attisé les tendances sectaires qui mettent en danger les populations locales et la paix internationale, tout cela dans le cadre de leurs intérêts expansionnistes en matière de colonisation.

Le plan ne prévoit aucune mesure visant à responsabiliser Israël pour son régime colonialiste d’apartheid, son occupation illégale et son génocide. Le flou délibéré du plan, l’absence de calendrier, de garanties contraignantes ou de conditions imposées à Israël pour un retrait complet et l’arrêt définitif des massacres, constituent une stratégie visant à gagner du temps. Cela permet à Israël de renforcer encore son régime d’apartheid sur le peuple palestinien des deux côtés de la Ligne Verte, tout en faisant traîner le processus afin de le modeler conformément à ses objectifs génocidaires et colonialistes. En outre, les conditions inscrites dans le plan ouvrent la porte à la reprise du génocide par Israël, même après que les Palestiniens auront satisfait aux exigences initiales. À maintes reprises, Israël a violé les accords précédents, rejeté les propositions de cessez-le-feu et fait échouer le dernier accord de cessez-le-feu tout en déclarant ouvertement son intention de « finir le job ».

La proposition décharge en outre les États tiers de leur responsabilité, les dispensant de leur obligation claire de demander des comptes à Israël et de s’abstenir d’aider et de soutenir son régime expansionniste d’apartheid colonial et d’occupation illégale. Les États doivent donc respecter leurs responsabilités juridiques pour mettre fin au génocide par des sanctions et l’isolement du régime israélien, tout en apportant un soutien à une force multilatérale mandatée par l’Assemblée générale des Nations unies pour protéger les Palestiniens. Les États doivent travailler conjointement pour démanteler le régime colonialiste d’apartheid israélien des deux côtés de la Ligne verte, qui est la cause profonde du génocide, mettre en œuvre les recommandations de la Cour internationale de justice dans l’avis consultatif de 2024 sur la Palestine visant à mettre fin à l’occupation par le retrait complet de la puissance occupante, mettre fin au siège de Gaza et l’annexion de la Cisjordanie, y compris Jérusalem, et garantir le plein exercice du droit collectif du peuple palestinien à l’autodétermination et au retour des réfugiés palestiniens et des exilés de la diaspora.

Nous soulignons donc la nécessité pour les États de cesser toute collaboration avec Israël et l’administration Trump aux États-Unis et d’utiliser tous les moyens à leur disposition en prenant les mesures concrètes mentionnées ci-dessous pour mettre fin au génocide et aux injustices en cours.

Recourir à des mesures diplomatiques, économiques et financières

  • Imposer un embargo militaire tripartite à Israël, couvrant toutes les armes, les technologies à double usage, les équipements de surveillance, le kérosène, la formation, les exercices conjoints et les bases militaires. Interdire la vente, l’achat, le transfert par voie aérienne, maritime ou terrestre, et les articles à double usage ;

  • Appliquer des sanctions diplomatiques, en expulsant les ambassadeurs israéliens, en suspendant les visites officielles et la coopération avec les autorités israéliennes ;

  • Imposer des sanctions ciblées, notamment des interdictions de voyager et des gels d’avoirs, aux personnes et institutions complices des crimes internationaux commis par Israël ;

  • Mettre fin à toute aide économique et à tout accord de coopération qui soutiennent le régime d’apartheid colonialiste et l’occupation illégale d’Israël, en résiliant les accords de libre-échange ;

  • Imposer un embargo énergétique en arrêtant toutes les importations/exportations de pétrole, de gaz, de charbon et d’électricité ; se désengager des projets d’extraction ; et mettre fin à tous les accords concernant le transit, les pipelines et les infrastructures impliquant le territoire palestinien occupé et sa zone économique exclusive ;

  • Interdire le passage côtier et l’accostage dans vos eaux territoriales des navires transportant des armes, du matériel militaire et à double usage, du carburant ou des marchandises soutenant les actes illégaux gravement illicites d’Israël ; interdire aux navires battant leur pavillon de transporter ce type de matériel militaire et à double usage ;

  • Résilier tous les accords bilatéraux et multilatéraux de libre-échange et de coopération, notamment l’accord d’association UE-Israël en vertu de la violation de l’article 2, et tous les programmes de coopération financés par l’UE, y compris les programmes universitaires, culturels et sportifs, ainsi que l’accord de libre-échange Mercosur-Israël ;

  • Adopter une législation nationale empêchant les entreprises relevant de votre juridiction d’opérer, de commercer, d’investir ou de maintenir le régime d’apartheid colonialiste et l’occupation illégale d’Israël, y compris son entreprise de colonisation ;

  • Démanteler le régime colonialiste d’apartheid d’Israël des deux côtés de la Ligne verte et, pour faciliter ce processus, créer un Comité spécial des Nations unies sur l’apartheid et un Centre des Nations unies contre l’apartheid.

  • Exiger que l’Assemblée générale des Nations unies suspende l’adhésion d’Israël pour violation des conditions d’adhésion, notamment le non-respect de la résolution 194. À cela s’ajoutent ses violations et attaques systématiques contre les principes et les institutions des Nations unies.

Recourir aux mécanismes judiciaires et de rendu de compte

  • Exercer la compétence universelle pour arrêter et poursuivre tous les auteurs israéliens de crimes internationaux, en particulier les dirigeants politiques et militaires impliqués dans la planification et l’exécution de crimes internationaux contre le peuple palestinien ;

  • Exécuter les mandats d’arrêt délivrés par la CPI à l’encontre du Premier ministre Netanyahu et de l’ancien ministre de la Défense Gallant en les arrêtant et en les transférant à La Haye s’ils se trouvent dans la juridiction, y compris dans l’espace aérien.
    Soumettre des interventions écrites à l’appui de l’affaire Afrique du Sud c. Israël pour génocide ;

  • Élargir la base de données des Nations unies sur les entreprises et les droits de l’homme afin d’y inclure les entreprises complices du génocide, ainsi que les entreprises et les organisations à but non lucratif impliquées dans le maintien du régime d’apartheid colonialiste des deux côtés de la Ligne verte.

  • Mettre en place un mécanisme international, impartial et indépendant pour la Palestine (IIIM) afin de garantir la responsabilité internationale et de préserver les preuves.

Tout plan concrets pour les droits inaliénables du peuple palestinien doivent centrer:

  • Le droit à l’autodétermination, norme impérative en vertu du droit international, pour les 15 millions de Palestiniens. Ce droit ne commence ni ne s’achève avec la création d’un État, mais inclut la volonté collective du peuple de déterminer librement son statut politique et de poursuivre son développement économique, social et culturel, y compris la souveraineté sur ses terres et ses ressources.

  • Le droit au retour pour tous les Palestiniens, pour les déportés exilés et les réfugiés déplacés pendant la Nakba (1948), la Naksa (1967) et les vagues successives de déplacements forcés.

  • Le droit à une réparation intégrale, y compris la restitution, l’indemnisation, la satisfaction et les garanties de non-répétition.

Soutenir les efforts palestiniens visant à reconstruire un leadership palestinien unifié et démocratique qui représente le peuple palestinien en Palestine et en exil en:

  • Mettan fin à la délégitimation des factions politiques palestiniennes et promouvoir la réconciliation nationale sans conditions imposées.

  • Faisant pression sur Israël pour qu‘il libère tous les prisonniers politiques palestiniens et mette fin aux détentions arbitraires et à la torture.

Organisations signataires

  • Institut palestinien pour la diplomatie publique (PIPD)

  • Al-Haq

  • Association palestinienne des jeunes pour le leadership et l’activation des droits – PYALARA

  • Initiative palestinienne pour la promotion du dialogue mondial et de la démocratie (MIFTAH)

  • Filastiniyat

  • Beitna

  • Union des comités de travail agricole (UAWC)

  • Société Rihannah